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Steven Van Belleghem : Quoi qu’il arrive, le client est roi !

Les entreprises se plaisent souvent à dire qu’elles sont orientées client. Mais est-ce vraiment le cas ? Comment, en tant que PME, répondre vraiment aux attentes des clients et même, si possible, en faire un peu plus ? Steven Van Belleghem, une des autorités mondiales dans ce domaine, vous donne la recette. L’expérience client est …

Les entreprises se plaisent souvent à dire qu’elles sont orientées client. Mais est-ce vraiment le cas ? Comment, en tant que PME, répondre vraiment aux attentes des clients et même, si possible, en faire un peu plus ? Steven Van Belleghem, une des autorités mondiales dans ce domaine, vous donne la recette.

L’expérience client est aujourd’hui devenue un sujet incontournable, a fortiori à une époque où tout le monde veut être livré dans les 24 heures. Mais comment définissez- vous ce concept en tant que spécialiste ?

Steven Van Belleghem : L’objectif principal d’une entreprise est de créer de la valeur pour les clients, ainsi que pour le propriétaire. Cela va au-delà des transactions et du marketing. Il s’agit de la culture d’une organisation, d’en convaincre le plus grand nombre de personnes dans l’entreprise et, bien sûr, de faire les bons choix.

Quel est le rôle du gérant d’une PME dans ce cas ?

Steven Van Belleghem : Il est tout simplement énorme. Dans les petites structures, la culture d’entreprise et le niveau d’orientation client dépendent presque entièrement du propriétaire. Pourquoi ? Chez certaines personnes, l’orientation client est inscrite dans leur ADN. D’autres en sont totalement dépourvues. Et si le patron n’est pas orienté client, les collaborateurs ne le seront pas non plus.

J’entends souvent dire qu’il est difficile de trouver du personnel orienté client. Je ne suis pas du tout d’accord ! Tout dépend du patron. L’orientation client des collaborateurs forme en effet une courbe de Gauss : 5 % sont super orientés client, 5 % ne sont pas du tout orientés client. Les 90 % entre les deux veulent faire de leur mieux et se sentent bien dans leur job. Les 5 % de collaborateurs super orientés client doivent être chouchoutés. Quant aux 5 % de collaborateurs pas du tout orientés client, mieux vaut ne pas les conserver. En tant que gérant, votre impact sur l’orientation client des 90 % restants peut être très important. Leur manière de travailler sera déterminée par le patron. C’est donc à vous de vous y atteler.

« Je compare souvent l’expérience client à un sapin de Noël que l’on peut allumer et éteindre d’un simple clic. Avec l’expérience client, ce n’est pas possible. Si vous commencez à économiser sur l’expérience client, vous en paierez inévitablement le prix. »

FAITES CE QUE VOUS DITES

Comment, en tant que gérant, convaincre vos collaborateurs d’être orientés client ?

Steven Van Belleghem : En montrant le bon exemple. Pensez à la situation où vous devez consacrer un grand nombre d’heures de travail imprévues à un projet pour qu’un client soit vraiment satisfait. Vous n’aviez pas prévu ces heures supplémentaires. Vous pourriez les facturer mais dans le même temps, vous voulez aussi aider le client. Il y aura donc dans un certain sens un conflit d’intérêts entre votre société et le client. Si vous donnez raison au client et ne facturez pas les heures, cela coûtera de l’argent à l’entreprise puisque vous devrez payer du personnel en plus.

Quelle décision prendre dans pareille situation ? Si vous osez choisir pour le client à ce moment-là, vous devrez avaler la pilule à court terme, mais créerez aussi des collaborateurs orientés client à long terme car ceux-ci verront votre choix et constateront que l’intérêt du client prime toujours. Au final, vous serez donc gagnant.

Autre exemple : vous remarquez qu’un de vos collaborateurs a fourni un travail supplémentaire pour aider un client sans vous en avertir. Si vous lui en faites le reproche, ce sera la dernière fois que ce collaborateur fera un effort supplémentaire pour vos clients. Beaucoup de collaborateurs ont peur d’être orientés client parce qu’ils craignent que leur supérieur ne leur mette des bâtons dans les roues et ce, que ce soit dans les petites ou les grandes entreprises. Pourtant, beaucoup trouvent juste génial d’être orienté client… En résumé, si des collaborateurs font quelque chose de plus pour les clients, vous devez les féliciter, et certainement pas les interpeller de manière négative.

UN PETIT CADEAU D’ADIEU… INOUBLIABLE

Les assurances sont ce que l’on appelle un « low interest product ». Mais peu de gens s’en préoccupent ou s’enthousiasment pour elles. Est-il donc plus difficile d’être orienté client dans cette branche ?

Steven Van Belleghem : Pas vraiment. Quel que soit le secteur, le client veut toujours la même chose : être vu, écouté et aidé. Cela va au-delà des assurances. Regardez Centraal Beheer, un assureur néerlandais qui veut être plus qu’un pur assureur. Centraal Beheer se qualifie de partenaire habitation et mobilité. Sur son site web, il est par exemple possible d’acheter des panneaux solaires. Il organise aussi des journées « petites bosses » au cours desquelles il est possible de faire réparer les petits dommages sur sa voiture partout aux Pays-Bas. Et tout cela, gratuitement ! Il organise des fêtes au cours desquelles les collaborateurs préparent des gâteaux pour les clients. Et si un client décide de partir, il a alors droit à un au revoir royal avec un courrier dans lequel Centraal Beheer le remercie pour sa confiance et lui dit qu’il sera toujours le bienvenu. Il reçoit aussi un sachet de graines de myosotis, clin d’œil au nom anglais de la fleur forget-me- not ou ne m’oublie pas… Une manière de se profiler vraiment différemment.

Est-il possible de faire marche arrière en matière d’expérience client et devenir ainsi une entreprise moins orientée client ?

Steven Van Belleghem : Je compare souvent l’expérience client à un sapin de Noël que l’on peut allumer et éteindre d’un simple clic. Avec l’expérience client, ce n’est pas possible. Si vous commencez à économiser sur l’expérience client, vous en paierez inévitablement le prix.

Regardez le secteur des aéroports. Pendant la pandémie, tout s’est arrêté. Beaucoup de personnes ont été licenciées. L’année dernière, nous avons tous repris l’avion mais dans les aéroports, c’était le chaos total. Les compagnies aériennes ne parvenaient plus à trouver du personnel. Pendant des années avant la pandémie, elles avaient en effet misé au maximum sur l’efficacité aux dépens de leur personnel pour augmenter leurs bénéfices. Ça a un prix… Car non seulement vous perdez vos meilleurs collaborateurs, mais en plus, ceux-ci racontent à leur réseau comment les choses se passent vraiment dans votre société. Et vous vous retrouvez alors dans un cercle vicieux. Investir dans l’orientation client et des collaborateurs heureux permet d’avoir des clients heureux… et aussi un actionnaire heureux car les résultats de l’entreprise seront en conséquence.

DE L’OXYGÈNE POUR VOTRE SOCIÉTÉ

On parle souvent du pourquoi d’une entreprise. Que pensez-vous des entreprises axées sur les valeurs : simple phénomène de mode ou approche indispensable ?

Steven Van Belleghem : Cela donne beaucoup d’oxygène à une organisation, tant dans les PME que dans les grandes entreprises. Tout d’un coup, vous et votre équipe faites plus que gagner de l’argent. Vous travaillez ensemble pour quelque chose d’important. Avec Nexxworks, nous organisons des voyages au cours desquels le management des entreprises peut découvrir de nouvelles expériences, s’informer sur les tendances, … Vous pourriez dire que notre objectif principal est de vendre le plus de billets possible, mais ce n’est pas vrai. Nous voulons préparer les entreprises à l’avenir et booster l’innovation dans les entreprises européennes. C’est une autre approche.

Je fais le parallèle avec le secteur des assurances. En tant que courtier, vous ne vendez pas des assurances. Vous voulez avoir un impact positif sur la vie des gens. Vous leur apportez par exemple une certaine tranquillité d’esprit, vous leur donnez des perspectives pour une retraite à l’abri des soucis financiers, … En fonction de votre business plan, vous devez avoir une vue d’ensemble, la partager avec votre équipe et susciter l’enthousiasme de vos collaborateurs. Cela donnera un élan supplémentaire à votre histoire et apportera beaucoup d’énergie positive à votre équipe.

Cela aide-t-il aussi à recruter les bons collaborateurs ?

Steven Van Belleghem : Bien sûr. Où aiment travailler les jeunes ? Dans des sociétés qui créent des changements positifs. C’est de cela dont on parle. N’oubliez pas que les jeunes ont aujourd’hui plus de possibilités que jamais sur le marché du travail. Créer sa propre affaire ou sa propre boutique en ligne ou se lancer sur les réseaux est très rapide… Savez-vous du reste que le troisième Belge le plus écouté sur Spotify est un jeune homme de 24 ans dont beaucoup n’ont jamais entendu parler ? Il s’agit de l’artiste Tibeauthetraveler, Tibeau Denamur de son vrai nom, qui compose de nouvelles chansons, les met sur Spotify et est immensément populaire. Avec un minimum de budget et en poursuivant simplement son rêve, il a réalisé l’impossible.

Faisons un petit retour en arrière. Beaucoup de jeunes aujourd’hui ont vu leurs parents travailler dur dans les années 1990 et 2000. Beaucoup ont aussi vu un de leur parents se faire licencier dans le cadre d’une restructuration juste parce que la société voulait faire plus de bénéfices alors qu’il s’était toujours efforcé de faire son travail le mieux possible.

Beaucoup de jeunes estiment que ce n’est pas juste. Cela crée des opportunités pour les petites entreprises où l’humanité et l’enthousiasme de réaliser quelque chose en équipe sont encore importants. Les jeunes sont davantage disposés à travailler pour de telles entreprises.

Dans quelle mesure les nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle et ChatGPT, peuvent-elles contribuer à une bonne expérience client ?

Steven Van Belleghem : Les possibilités sont énormes selon moi. Aucun logiciel n’a à ce jour été adopté plus vite que ChatGPT. Google fait vraiment old school par rapport à ChatGPT qui améliore considérablement la productivité en matière de communications. Je m’attends à voir de nombreuses PME déployer très bientôt ChatGPT et l’intelligence artificielle en général.

DANS LA COUR D’UN RESTAURANT ÉTOILÉ

Quelle a été votre expérience client la plus marquante ?

Steven Van Belleghem : Avec un groupe de huit amis, nous avions réservé une table dans un restaurant étoilé. Mais une fois arrivés sur place, il s’est avéré que nous nous étions trompés de date dans la réservation et nous n’étions attendus que trois mois plus tard… La responsable a alors remué ciel et terre pour nous trouver une place assise, même si l’endroit était bien sûr complet. Il faisait beau et on nous a trouvé une place dans une petite cour à l’arrière du restaurant. Nous étions assis là, seuls avec notre petit groupe, autour d’une table éclairée par 50 ou 60 bougies. Nous avons eu droit à un service personnalisé de grande qualité et ce fut une soirée merveilleuse à laquelle nous repensons encore aujourd’hui avec beaucoup de plaisir. Pourtant, la dame aurait tout aussi bien pu dire qu’il n’y avait plus de place et on n’en parlait plus. Mais sa volonté de trouver une solution a également montré à ses collaborateurs à quel point elle était orientée client. Quoi qu’il arrive, le client est roi ! Ce genre d’expérience est inoubliable.

« Essayer de devenir un véritable partenaire de vie pour vos clients. Apportez un changement positif dans la vie de vos clients. C’est comme ça que vous ferez vraiment la différence. En tant que courtier, vous êtes impliqué dans tous les moments importants de la vie de vos clients. »

OPTEZ POUR LE CHANGEMENT POSITIF

Le marché des finances et des assurances est le théâtre d’une importante vague de consolidation. Cela représente-t-il une menace au niveau de l’expérience client ?

Steven Van Belleghem: Pas nécessairement. La fusion entre deux ou plusieurs assureurs ou bureaux de courtiers représente bien sûr toujours un moment charnière. Il s’agit alors de confirmer ou redéfinir la culture d’entreprise. Et c’est aussi un moment idéal pour utiliser cette culture pour susciter l’enthousiasme du plus grand nombre.

Pourriez-vous, pour terminer, donner encore quelques conseils aux courtiers pour se démarquer ?

Steven Van Belleghem : En ce qui concerne les produits, vous ne pouvez pas changer grand-chose puisqu’ils sont déterminés par l’assureur. Mais il existe d’autres possibilités. Vous pouvez par exemple faire en sorte d’être extrêmement accessible pour les clients. Laissez aussi les clients choisir le canal qu’ils souhaitent. Whatsapp, Messenger, téléphone, e-mail, … ? Peu importe. En tant que courtier, vous devez juste veiller à disposer de ces canaux. Il faut vivre avec son temps. Plus vous serez accessible, plus vous pourrez montrer vos atouts. Et plus vite vous pourrez travailler.

Une autre option consiste à essayer de devenir un véritable partenaire de vie pour vos clients. Apportez un changement positif dans la vie de vos clients. C’est comme ça que vous ferez vraiment la différence. En tant que courtier, vous êtes impliqué dans tous les moments importants de la vie de vos clients. Mais vous devez approfondir la relation et montrer de l’empathie. Être présent lors d’un décès, aider vraiment les gens, agir vite, … le bouche-à-oreille jouera son rôle. Et c’est aussi comme ça que vous gagnerez le droit de jouer votre rôle lors du prochain moment important de la vie du client…

Pensez aussi à l’impact que vous pouvez avoir sur la société, à la manière dont vous pouvez aider les gens de votre entourage avec votre expertise. Avec des conseils de sécurité et de prévention par exemple. Et si vous communiquez sur toutes ces choses, que vous impliquez vos collaborateurs, que vous êtes vous-même enthousiaste, … vous créerez une histoire qui rendra vos clients fiers d’être clients chez vous. N’est-ce pas là un objectif idéal ?

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